“Petit ! Dans la vie, il y a ceux qui font tourner le jeu de Doom et les autres !”. Cette phrase provenait d’un microprocesseur (µp) des années 90. L’ancêtre avait vécu de grandes aventures. Mais il n’imaginait pas que 30 années s’étaient écoulées depuis sa génération. Pour lui, avant, c’était quelque chose. Il avait fait la guerre, virtuelle et dans un jeu vidéo. Mais il pensait que cela nous ferait du bien. S’il savait …
L’un de nos jeux actuels est de savoir quel appareil électronique peut faire tourner le jeu de prédilection de l’époque de notre ancêtre, le fameux Doom. Dès le moment qu’un objet a un microcontrôleur ou un µp, on cherche à installer le FPS originel pour vérifier que ce dernier fonctionne. S’il a un écran, c’est encore mieux. La liste des objets éligibles au test est impressionnante.
Mais, d’abord, faisons un petit retour sur le fameux Doom. Certains vous diront qu’il n’est pas le premier FPS (First Person Shooter – Tir à la Première Personne). Peut être, mais c’est lui qui a donné au genre ses lettres de noblesse. Avant, les jeux du genre étaient moches et lents, avec une bande son inexistante ou affreuse. Doom a corrigé tous les défauts de l’époque.
Le jeu était nerveux avec des graphismes détaillés pour l’époque et une bande son digne des meilleurs groupes de métal. L’histoire se résume à traverser des niveaux tout en éliminant les monstres s’y trouvant. Il paraît qu’il existe un scénario plus élaboré. Cela ne m’a pas marqué.
Doom est sorti en 1993 dans un format dit ‘shareware’ ou partagiciel. Le tiers du jeu est gratuit. Ensuite, il faut passer à la caisse pour continuer l’histoire. Il fallait un µp 486 cadencé à 33 MHz pour pouvoir profiter du jeu. C’était une configuration moyenne à l’époque où les ordinateurs coûtaient assez cher.
Le jeu a été un succès de l’époque. Initialement pour les ordinateurs, il se devait d’être décliné sur les consoles de jeux vidéo. Ainsi, on le retrouve sur la MegaDrive (avec l’extension 32X), sur la super Nintendo (avec coprocesseur superFX2), sur la Saturn, la PlayStation, la 3DO, … Il existe une version Nintendo 64, mais il s’agit d’une adaptation plus que d’un portage.
Bref, dès sa création, le jeu était le témoin de la puissance du support sur lequel il tournait. Dès lors, dès que sortait un matériel, des informaticiens se demandaient si Doom pouvait tourner dessus. Vous me direz que c’est évident puisque avec la loi Moore, la puissance des µp est doublée chaque 18 mois. Le défi n’était donc pas intéressant.
Sauf que l’informatique s’est répandue dans les objets du quotidien. De nos jours, des µp se retrouvent partout : appareils photographiques, réfrigérateurs, machines à laver, brosses à dents électriques, framboise magique, tablettes pour enfants, voitures, montre connectée, miroir magique … Ainsi, la question est revenue à la mode.
Toutes les expériences sont consignées sur un site : ‘It runs Doom!’. Vous trouverez les exploits les plus farfelus. Alors si l’ancêtre apprenait qu’un simple test de grossesse a fait tourner son jeu favori, je ne sais pas quelle tête il ferait. Lui, la star des laboratoires et des centres de recherche de l’époque, presque égalé par un banal consommable.
Ce jeu d’installer Doom partout est le reflet de l’évolution de l’informatique. Désormais, dans notre vie, nous n’y prêtons plus attention. L’informatique s’est démocratisée. Des puissances de calcul phénoménales pour l’époque, utilisées pour la recherche ou l’administration, se retrouvent aujourd’hui pour vérifier l’efficacité de notre brossage de dents.
Ce défi de quelques geeks passionnés d’un jeu décrié à l’époque est révélateur de la banalisation de l’informatique.