Sus aux piraates

Au début des années 2000, le piratage est devenu un véritable problème pour les auteurs et les ayants droits. En France, lorsqu’on a un problème, on se tourne vers ceux qui font les lois, le Gouvernement. Celui-ci prend la décision de créer une Commission chargée de régler le problème. Souvent, la solution n’arrive jamais et le problème disparaît de lui même. Les acteurs trouvent eux-mêmes une réponse. 

Pour autant, la Commission reste et évolue. Ainsi, le piratage sur Internet a donné naissance à la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet, HADOPI. Réponse du gouvernement aux suppliques des Majors, l’Autorité devait mettre fin au piratage. À l’origine, ce devoir aurait dû être donné à un organisme existant. Mais ne pouvant trancher entre SACEM, CSA et d’autres organismes autour du droit d’auteur, nos dirigeants ont préféré la nouveauté.

Ainsi, par le décret n° 2009-1773 du 29 décembre 2009, naquit la HADOPI. Mais comment fait-il pour combattre le piratage d’œuvres sur Internet ? Le principe est simple : 

  • sensibiliser la population des risques du piratage pour la création artistique,
  • favoriser les comportements positifs, 
  • punir les contrevenants. 

De la sensibilisation du public aux dangers du piratage, on retient surtout une campagne maladroite. Entre super crapule qui ‘bien caché derrière son ordinateur, se gave comme un ouf’ et Emma Leprince dont le clip et la musique me fait souhaiter qu’elle ne réussisse jamais dans la chanson, la communication de l’autorité est désastreuse. Depuis, elle s’est faite plus discrète. Mais, même pour les dernières campagnes, elle reste hors sujet.

Pour favoriser les comportements positifs, Hadopi a adopté plusieurs stratégies : proposer le label Pur (promotion des usages responsables) et encourager l’adoption des plateformes légales en offrant des cartes d’accès aux adolescents. Qui passe par le portail Pur pour trouver des services légaux ? Personne. Idem pour la carte offerte. Au final, peu de jeunes l’ont demandé. 

On retient surtout l’aspect répressif de l’Institution. Pour décourager les gens de pirater, l’idée est de contrôler ce que vous récupérez sur Internet.  La Hadopi se présente comme un utilisateur des réseaux P2P et collecte les adresses IP des autres utilisateurs lorsque ceux-ci demandent un fichier protégé et connu de l’autorité. Donc elle se travesti en pirate pour les trouver. 

Ensuite, elle demande aux FAI (Bouygues, Oranges, …) l’adresse des utilisateurs derrière les adresses IP récupérées, parfois à tort. Suivant la situation, elle envoie un mail, une lettre recommandée ou une convocation au tribunal. La Hadopi ne surveille donc pas les pirates qui utilise le streaming ou le téléchargement direct.

Si vous cherchez une émission qui explique les mécanismes anti-piratage proposés par Hadopi, je vous conseille d’écouter le dossier de Lord Ton Père (LTP) dans l’épisode 10 de l’Apéro du Captain. Pour ceux qui veulent éviter les élucubrations de cette bande d’amis, LTP commence son dossier à 37’45’’.  

Au final, la Haute Autorité n’a pas servi à grand chose. À part envoyer des courriels et des lettres recommandées, elle n’a jamais arrêté de ‘super crapules’. Au mieux, une centaine d’entre eux a été condamné à des montants faibles. La multiplication de l’offre légale et globale par des acteurs privés a été bien plus efficace. De nouveaux circuits de financements se sont mis en place pour appuyer les créateurs. Et tout cela, sans l’aide de l’État.

Et aujourd’hui, elle ne sert plus à rien. Bien sûr les gouvernements successifs lui ont trouvé de nouvelles missions. Si elle continue à prévenir les quelques retardataires (10 ans de retard quand même) qui utilisent encore le P2P pour récupérer des films, elle a désormais une mission d’observation des usages d’Internet et de conseil pour la sécurisation des réseaux privés. Bref, un machin inutile alimenté par nos impôts. Quel président décidera de faire des économies ?

‘Super crapule’ est toujours actif. Désormais, avec l’IPTV, il se croit comblé en regardant les matchs de foot sans payer les abonnements BeIn Sport ou RMC Sport. Laissons le roi en haut de sa colline. Qui sait pourquoi il en est venu à ne pas participer aux services qu’il consomme ? 

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