Pour cet article, je vais plonger dans un lieu connu des influenceurs, des trolls et des évangélistes de tous bord : Twitter. Souvent décrit comme les latrines d’Internet, ce service part pourtant d’un concept simple et efficace : partager ses idées en 140 caractères. Avec si peu de matière, le résultat se veut (d)étonnant. Surtout que s’est cumulé un autre mécanisme : le pseudonymat.
Le pseudonymat
Mais définissons le pseudonymat. Vous voyez ce qu’est l’anonymat. Personne ne sait qui est l’auteur de propos visibles sur un service. Selon ses intentions, l’anonyme sera considéré comme corbeau ou lanceur d’alerte, sans risquer de représailles. Le pseudonymat, les propos sont liés à un pseudonyme. L’auteur, derrière, développe sa pensée. Connu réellement du seul le fournisseur de service, sa vie privée reste donc protégée sauf s’il enfreint la loi … américaine.
Le pseudonymat permet à des gens de s’exprimer sans s’inquiéter du “qu’en dira-t-on”. Cela permet à des idées originales de ressortir. Pour les introvertis, le système aide à l’expression. Cependant, certains usent de ce pouvoir pour prendre leur revanche sur la société, de la pire des façons. La haine gratuite se retrouve au même niveau que l’information heureuse et l’idée originale. Dans ce purgatoire d’Internet, le pire côtoie malheureusement le meilleur.
La dérive
Sous prétexte d’informer, le moindre propos est interprété en 140 caractères jusqu’à devenir diffamatoire. Le pathos prend le dessus sur les faits et le moindre sujet peut devenir un débat explosif. Le concept de ‘point Godwin’ est dépassé parfois dès la première réponse. Il faut alors écarter de nombreux Tweets avant de trouver des remarques intéressantes.
Vecteur d’influence, Twitter est exploité par les politiques qui trouvent dans ce service une publicité gratuite. Les personnalités peuvent engager des Communities Managers pour réagir sur leurs comptes aux bonnes informations, au bon moment. Mais la rumeur enfle sur leur popularité numérique. Ont-ils acheté leurs followers (abonnés) ? Les réactions de ces derniers sont-elles sincères ou manipulées ?
Certaines ‘célébrités’ moins fortunées ont aussi plusieurs comptes. L’officiel où ils présentent leur meilleur profil, et les officieux qui permettent de créer des messages de soutien ou, au contraire, d’insulter ceux qu’ils considèrent comme hérétiques à leur pensée. Il est amusant de constater ce dédoublement de personnalité lorsqu’ils prolongent sur leur vrai compte une idée initiée en arrière-cuisine.
La régression
Les influenceurs sont suivis. Les abonnés qui partagent leurs idées se regroupent en communauté. Il n’est pas rare qu’entre deux influenceurs aux idées opposées, les abonnés de ces communautés s’échangent des torrents d’insultes. Sous couvert d’ânonymat certains se pensent intouchables.
Ils ont renseigné de fausses informations à l’inscription du service. Cachés derrière un pseudonyme, une adresse mail temporaire, un AdBlock (anti-publicité) et un VPN, ils oublient qu’ils émiettent des cookies diffusés par les sites populaires. Et ce n’est pas la ‘navigation privée’ qui les protègera du retour de bâton de propos ignobles.
La défense
Les policiers n’ont pas attendu la technologie pour mener des enquêtes. Et s’il faut fouiller dans des milliers de conversations pour trouver des recoupements et construire des profils, ils prendront le temps. L’analyse de l’orthographe était déjà utilisé par les enseignants pour distinguer l’auteur du copieur. De plus, les outils informatiques permettent de faire ce travail sans l’aide de l’oiseau bleu.
Mais la Police n’interviendra pas pour retrouver celui qui se met à vous insulter et vous diffamer. Ces moyens d’investigations sont d’abord réservés aux personnalités publiques de premier plan. Comment survivre alors lorsque l’armée des Trolls et des Haters décide de s’acharner sur vous ?
La réponse à été trouvé, la BlockList (la liste des comptes bloqués). Cela part d’une bonne idée. Si quelqu’un vous insulte, vous pouvez refuser de voir ses messages. Chaque pseudonyme insultant peut donc être écarté. En retour, il ne verra pas vos message. Bonus, vous pouvez partager votre liste et permettre d’autres personnes de ne pas subir les assauts des Trolls. Mais ce pavé s’est transformait en censure.
Le paradoxe
Imaginons que quelqu’un qui ne vous aime pas vous mettent dans sa BlockList. L’inimitié étant réciproque, cela ne vous dérange pas. Maintenant, il diffuse sa BlockList à tous ses contacts en expliquant qu’il référence tous les ‘fachos’ de la Terre. Et demande à ces contacts de faire de même. Vous pouvez être la personne la plus intègre de l’Univers, vous êtes désormais catalogué comme infréquentable.
Vous venez d’être annulé. Et pendant ce temps, votre opposant pourra s’en prendre à vous sans que vous ne puissiez réagir puisque vous ne le saurez pas. Laissez aux lâches ce genre de manoeuvre. Ce petit jeu les rassemblera dans leur caste des sombres lumières.
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L’épisode de South Park paraît presque fade par rapport à la situation actuelle. Cartman utilise Butters comme BlockList pour se protéger des réactions négatives. Son refuge, sa Safe Space, lui permet de ne pas se confronter aux réactions négatives. Mais revenons dans la réalité. Même Cartman, qui est le personnage le plus nocif de cette série déjantée, n’est pas assez fourbe pour réduire ainsi les gens au silence.
Anonymes ou célébrités, parlez sur Internet comme vous parleriez dans la vraie vie. Même si vous n’êtes pas d’accord avec ses idées, derrière un compte se trouve un être humain.