Café philosophie #13

“Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux.” C’est une mauvaise traduction d’un texte de Benjamin Franklin qui semble faire foi dans des milieux faussement intellectuels. Le président américain dénonçait les intérêts privés d’une famille avant ceux de la nation. De nos jours, la phrase est utilisée pour dénoncer l’inverse.

La liberté n’est pas ce que nous choisissons de faire mais ce que les autres nous permettent de réaliser. Seuls, hors de la civilisation, nous sommes libres de tout. Mais nos choix sont restreints, moins visibles. Ensemble, nous devons respecter les autres et les opportunités sont immenses. Chercher à sécuriser nos relations n’est pas une concession de liberté mais un socle pour de nouvelles libertés.

Dans le monde informatique, ‘liberté’ et ‘sécurité’ ne sont pas non plus des notions antagonistes. Certes, il n’y a pas plus libre qu’un hacker, mais tout le monde n’a pas une conscience du domaine aussi grande que ces derniers. Alors, les gens doivent s’appuyer sur les infrastructures mises à disposition par les fournisseurs d’accès et sur les créateurs de services pour en profiter. 

En passant par ces deux acteurs, chaque utilisateur doit accepter un certain nombre de règles. Ces règles servent à assurer la viabilité des services et infrastructures. Pour l’infrastructure, l’abonnement est payant (à moins d’emprunter le Wifi de son voisin). D’autres règles limitent notre consommation ou nos usages. Sur une autoroute, un camion paie plus qu’une voiture et la vitesse est limitée. 

Les services sont majoritairement gratuits. Mais il s’agit d’une gratuité de façade puisque nous donnons des renseignements exploités par des vendeurs. Passé ce détail, le service souhaite vous connaître pour savoir s’il peut vous faire confiance. Quel commerçant a envie de retrouver son magasin saccagé par des sociopathes ? Alors il code des règles supplémentaires. Le code informatique représente autant la loi que son application. 

Pour certains, Internet n’est donc pas libre puisqu’il existe des règles. La sécurité nécessaire à la viabilité d’un service empêche la liberté d’action. Pourtant, si le service ne plaît pas, il est tout à fait possible d’en créer un idéal. La liberté totale se présente alors, tant que vous n’enfreignez pas les règles de votre pays. Autrement, il faut passer par des mécanismes alternatifs : VPN, crypto-monnaies, Tor, … 

Voulez-vous aller plus loin ? Vous pouvez utiliser ces mécanismes et contourner les restrictions géographiques. Mais vous restez dépendant de ces outils. S’ils sont fiables, il n’en est pas forcément de la part de ceux qui les ont mis en place. Quelle confiance attribuez-vous à quelqu’un que vous ne connaissez pas ? Quel risque êtes-vous prêt à prendre pour un peu de liberté ? 

Mon but sur ces dernières questions n’est pas de vous apporter des réponses toutes faites ou de vous donner mon point de vue. Ce qui est compliqué sur Internet, ce sont les relations humaines. Et sans protection, les dérives sont nombreuses et immédiates. 

Il existe toutefois une liberté fondamentale : la neutralité du Net, le fait de ne pas prioriser de services sur Internet. Cette liberté est remise en question par les États et par les grands groupes industriels. Et les arguments sécuritaires utilisés sont fallacieux. Mais je vous laisse creuser le sujet. 

Finissons par une autre citation. “Entre le faible et le fort, c’est la liberté qui opprime et la Loi qui libère”, Henri Lacordaire. Si Internet vous semble sûr, simple et rempli d’opportunités, c’est bien parce que des règles, des protocoles sont là. 

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