“Si les jeunes ne sont pas allés voter, c’est parce que c’est difficile. Ce serait plus facile si on pouvait voter depuis son téléphone.”. Je me permettrai bien de dire qu’il n’y a rien de compliqué de marcher 500 mètres pour glisser un papier dans une enveloppe, puis l’enveloppe dans l’urne, mais j’entends déjà le ‘OK boomer !’ arriver. Alors posons la question du ‘vote électronique’.
L’idée est simple. Donner son avis sur des questions depuis une application Internet. Afin de faciliter le choix, plusieurs réponses sont proposées. Il ne reste plus qu’à sélectionner celle qui nous convient. C’est ainsi que des millions de jeunes votent à travers Facebook, Tiktok, Instagram, … pour approuver les choix de leurs influenceurs favoris. Sauf que cela n’a rien à voir avec le vote.
Il s’agit en fait de sondages. Concrètement, ces questions n’ont aucune influence pour le commanditaire. Il est libre de faire ce qu’il veut, même si le sondage lui est négatif. “Qui a dit comme le référendum européen de 2005 ?”. D’ailleurs, les sondages sur les réseaux sociaux sont aussi utilisés pour fidéliser le public en donnant l’illusion du choix.
Le vote a des conséquences réelles sur l’ensemble de la population interrogée. Alors, une simple application facilement contournable ne peut être utilisée pour choisir ceux qui vont diriger nos organisations pour les années à venir. Ce n’est pas le Monopoly de MontCuq. Ainsi, certaines contraintes doivent être respectées pour s’assurer de la légalité de la procédure. L’enjeu a des conséquences importantes sur les prochaines années.
Il faut d’abord que les votants aient la compréhension complète de la question posée. Un devoir d’information est donc nécessaire pour expliquer le contexte et les différentes réponses apportées. Le matériel électoral (renommé servilement propagande électorale par des journalistes) doit être accessible à tous les votants. Étrangement, lors des dernières élections, j’ai fait partie des millions de français (1% selon la police) qui n’ont rien reçu.
Autre contrainte, un votant ne peut s’exprimer qu’une seule fois. Il n’est pas possible de répondre plusieurs fois à une question ou de s’exprimer à la place d’un autre votant (sauf si ce dernier l’a autorisé). Cela implique que le votant doit signer son acte. L’anonymat est donc interdit. Par contre, le vote ne doit pas être lié au votant.
La contrainte du matériel électoral est facilement réalisable avec les moyens modernes. Internet permet le partage de l’information. Donc, il est possible de consacrer un site Internet aux élections en cours. Ce site devrait être mis en place par l’entité responsable des élections. Dans la pratique, des sites existent mais il s’agit d’initiatives privées. Difficile d’assurer alors la neutralité des informations.
La contrainte du vote est plus difficile à mettre en œuvre. Pour que D4rkKa0s puisse voter depuis son téléphone, il faut d’abord s’assurer que c’est bien lui qui vote. L’anonymat et le pseudonymat sont donc bannis. Il faudra donc que D4rkKa0s prouve son action. La reconnaissance faciale existe pour les téléphones. Si Apple coopère avec les organisateurs, peut-il se porter garant de l’authenticité du votant ?
Je ne suis pas sûr que la CNIL accepte qu’une société privée gère l’identité numérique et l’identité réelle d’un individu, même si cela se produit de nos jours. Dans ces conditions, il est facile de créer de faux profils. La reconnaissance faciale ne peut être utilisée.
Mais conservons l’idée d’une application officielle de vote électronique. Il faut donc qu’au moment du vote, l’utilisateur transmette copie de sa pièce d’identité et une photo prise par l’application officielle. Bien sûr, un contrôle (logiciel ? humain ?) devra être effectué avant de valider le vote. Lorsque le scrutin sera terminé et validé, les informations sur les votants seront supprimées. D4rkKa0s a voté.
Bien sûr, à aucun moment le logiciel ne doit rattacher le vote de D4rkKa0s à D4rkKa0s lui-même. Ce sont 2 entitées séparées. Cela n’est pas compliqué à programmer pour un informaticien. Pourtant la question de la probité du développeur demeure. Qui peut prouver que le logiciel de vote n’a pas été truqué ? Complot facile me direz-vous. Allez lire les sources de ‘Tous Anti Covid’.
Pourtant, au-delà du logiciel, il est facile de corrompre un système. Même si l’organisateur du vote a tout mis en œuvre pour respecter le scrutin, même si le logiciel est parfaitement écrit, rien ne prouve qu’il n’existe pas des failles. Un logiciel s’exécute sur une machine. Le téléphone de D4rkKa0s peut avoir été modifié pour transformer son vote à son insu.
Pour éviter que D4rkKa0s marche 500 mètres et croise des êtres humains qui n’appartiennent pas à sa bulle, réinventons notre démocratie. Je veux bien qu’on aille vers ces solutions si cela permet à des personnes lourdement handicapées d’exprimer leurs positions. Mais pour les autres, prenez 15 minutes de votre vie, cela ne vous tuera pas.