Ce soir sur BFM Débats, nous répondrons à cette question qui passionne le monde de l’informatique : les informaticiens sont-ils des capitalistes convaincus ou des communistes acharnés ? Pour cela, nous recevons nos invités, le célèbre freelance John David Goodman (JDG) et le chercheur en cyber sécurité Pavel Dimitri Popov (PDP).
Pour le débat de ce soir, nous vous proposons que vous avanciez chacun à votre tour un argument sur lequel pourra répondre votre contradicteur. Le tirage au sort a décidé que vous commencerez M. Goodman .
JDG : Merci bien. Le capitalisme, c’est la liberté à chacun d’entreprendre sans avoir de compte à rendre à un pouvoir centralisé. C’est l’esprit de l’informatique. Chacun peut prendre en main des outils simples, comme un logiciel de création de site, et créer une plateforme d’échange de services.
PDP : Vous citez un exemple d’outils. Il y en a des milliers. De l’éditeur de texte à l’IA la plus perfectionnée. Pensez-vous que ces outils viennent du néant ? C’est le fruit du partage des connaissances qui permet à chacun d’utiliser ces outils. Dans votre logique, toute innovation devient une propriété privée à laquelle il faut payer pour accéder.
JDG : Cela semble vous déranger. Il faut bien payer le service. Et c’est ce qui nous permet aujourd’hui d’être à la pointe de la technologie informatique. Vous n’ignorez pas que les compagnies les plus influentes de ce monde, les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) sont américaines.
PDP : Vous avez su investir les marchés au bon moment. C’est surtout pour cela qu’aujourd’hui vous dominez. Ces entreprises se sont aussi construites en achetant le travail de concurrents moins chanceux.
JDG : Et oui, c’est cela l’esprit du pionnier américain. On prend exemple sur Rockfeller. Dans les affaires, pas de pitié. C’est pour cela que j’affirme que l’informatique est capitaliste. Pour autant, chacun est libre de tenter sa chance. De nouveaux riches apparaissent grâce à notre système. La ruée vers l’or continue.
PDP : Ruée vers l’or ? Liberté d’entreprendre ? Tout le monde peut devenir riche grâce à son travail dans l’informatique ? Le domaine me semble pourtant très régulé. En Europe, les règles sont nombreuses : RGPD, contrôle des radio-fréquences, … Dans votre paradis capitaliste, les brevets cadrent la création.
JDG : De là à penser que ce sont des pratiques communistes. Nous sommes loin de ce qui se passe sous vos latitudes. L’autre grande muraille de Chine, le contrôle automatisé et combien d’autres exemples. Nous, nous laissons les lois du marché réguler l’offre et la demande. Mais je pense aussi que les informaticiens se passeraient de cette surveillance.
PDP : Le problème n’est pas la technologie mais ce que les gens en font. Et à ce propos, je trouve que vos milliardaires ressemblent beaucoup à nos apparatchiks. De bonnes relations avec ceux qui font la loi permettent de s’enrichir. Et cela se fait au détriment d’innovateurs qui partagent leurs connaissances à tous.
JDG : L’innovation arrive parce que quelqu’un a appliqué un outil informatique dans un contexte nouveau. Ensuite, il propose son idée et l’améliore tant qu’il peut afin que le public ne s’en aille pas à la concurrence. Le fait de chercher à progresser plus vite que les autres et de créer de nouveaux outils … c’est capitaliste.
PDP : Votre informaticien capitaliste trouve qu’il est plus utile de partager les outils de base que de les vendre. Certes, il vend aussi son expérience mais il constate qu’ouvrir un système le rend plus attractif que de breveter à outrance. Le partage des outils à tous … c’est communiste.
JDG : C’est la tarte à l’américaine. Plus il y a d’acteurs et plus le gâteau est grand. Certes, il y a aussi plus de concurrence, donc de raisons de s’améliorer. L’informaticien n’est ni capitaliste, ni communiste. C’est au service des États et d’autres intérêts privés non liés au domaine que son travail peut prendre une couleur politique.
PDP : Je suis d’accord. L’informaticien souhaite être reconnu pour son travail et avoir sa place dans nos sociétés modernes. Et il doit prendre conscience de l’influence de ses créations. Notre échange m’a ouvert les yeux. Et comme le dit l’un de vos célèbres boxeurs : “Si je peux changer, et si vous pouvez changer alors tout le monde peut changer”.