LV1 : Lol, niveau 2

L’informatique est un monde à part avec des codes et des langues différentes. Il reste orienté vers le besoin premier qui est d’automatiser les tâches répétitives du monde réel. Il existe une branche différente qui elle automatise et se nourrit de l’imaginaire des gens : les jeux vidéos. 

N’en déplaise aux amateurs d’Arts, en 40 ans, cette branche a donné vie à des œuvres plus étranges et obsédantes que les autres domaines. Il faut dire que placer le spectateur au centre de l’action séduit même le plus réfractaire lorsque l’œuvre présentée le touche au cœur. Cependant …

Loin de faire progresser son public, les jeux vidéos semblent l’enfermer dans un monde à part. Et cela commence par le vocabulaire. Au départ, des anglicismes sont apparus. On l’a vu dans un article précédent, LV1 : LoL, des acronymes basés sur des termes anglais permettent d’échanger rapidement lors de sessions. 

Aux acronymes se sont ajoutés des termes anglais. 5 minutes à écouter un direct sur la plateforme Twitch et vous entendrez des commentateurs parler de  ‘lane’, ‘stuff’, ‘rush’, ‘noob’, … Qui dit que les français ne parlent qu’une langue ? Nous pourrions nous réjouir si le héros de la vidéo enchaînait dans un français riche. 

Non, l’échange ressemble à du franglais, un français pauvre agrémenté de termes anglais. Il y a peu de chance que le joueur puisse entretenir une longue conversation dans une échoppe londonienne. Connaît-il même l’équivalent français des termes qu’il emploie ? ‘chemin’, ‘équipement’, ‘ruade’, ‘débutant’ (péjoratif).

Les développeurs créent des jeux addictifs. Pour cela, il est nécessaire de limiter l’univers à des éléments et des mécaniques simples à comprendre. Il en découle un vocabulaire limité. C’est ce qu’attend le public, pourquoi changer ? Le public n’est pas homogène, si le joueur moyen passera quelques heures, le passionné en cumulera des milliers. 

Il optimisera son cerveau à son univers de cœur quitte à adopter les éléments de langage les plus efficaces lors de parties avec ses collègues. Telles 2 intelligences artificielles qui échangent entre elles, le langage employé par les passionnés deviendra incompréhensible pour le reste du monde. 

Pour rester attractif, le jeu de prédilection doit évoluer. Les mécaniques de jeu ne peuvent évoluer que très lentement au risque de perdre l’attention des passionnés. C’est donc la diégèse (le lore en langage gamer), l’univers du jeu, qui évolue. De nouveaux héros et de nouveaux antagonistes sont ajoutés. 

Le langage du joueur se complète ainsi avec de nouveaux noms propres qui n’ont aucune signification pour les non-joueurs. Leurs proches diront qu’ils vivent dans leur monde et ne s’inquiéteront pas si le reste du temps ils réussissent leur scolarité ou leur vie professionnelle. Ce sont des geeks …   

Ce ne serait pas inquiétant si la part de joueurs passionnés (hard core gamers) ne s’accroissait pas autant. Il existe des passerelles entre le monde virtuel et le réel. Et le langage en est un. Si celui-ci s’affaiblit, ce n’est pas bon signe. Les développeurs de jeux vidéos réalisent involontairement le travail du Miniver dans 1984.

Un exemple valant mieux qu’un long discours, je vous laisse devant un échange entre 2 joueurs trouvé sur un forum. L’échange est sur le jeu League of Legends mais il aurait pu être sur d’autres jeux populaires tels Fortnite, Dofus ou Rocket League. J’ai laissé les fautes d’anglais et de français. Je vous laisse chercher la traduction.

A : Pourquoi perma un champ aussi puant que viktor ?

B : On parle bien du même « APC ranged » qui en a rien a foure de se faire catch au cac et poke à distance tellement il peut se sheild + poser sa zone de stun à ces pied pendant que sont R te fume (+ son rayon inévitable tellement le truc te touche alors que t’es en rien sur la trajectoire qui se déssine au sol)

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J’ai de la chance !!!