Le premier serveur web a été créé au CERN (Centre Européen de Recherche Nucléaire) en 1990. Comme disent les chercheurs : “Ce n’était pas notre métier mais on avait besoin de partager nos documentations.”. Pour une fois que quelque chose utile à la société sortait de ces laboratoires, on n’allait pas leur reprocher.
Le seul problème de la documentation scientifique est que le public est restreint. Internet n’attire guère les foules. Seuls des étudiants ont le temps de partager d’autres connaissances sur le réseau naissant Internet. Ils ont un mécanisme (le serveur web), un langage (le HTML) et pas de public.
À partir de 1995 en France, les foyers s’équipent d’ordinateurs et les connectent à Internet. Quelle folie alors que le Minitel est déjà présent. A-t-on besoin d’aller plus vite alors que des milliers de services sont déjà accessibles depuis chez soi ? Reste à alimenter le réseau. Le contenu reste majoritairement anglophone.
Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) se multiplient. Les hébergeurs de sites Internet aussi. Sur les 2 dernières années du millénaire précédent, au moins 5 acteurs voient le jour : OVH, gandi.net, ikoula, LWS et amen.fr. Connus surtout des informaticiens, ils attirent les grandes entreprises qui voient en Internet une vitrine pour leurs produits.
Ces entreprises sont dignes de celles apparues dans la Silicon Valley deux décennies auparavant. De jeunes hommes qui héberge des serveurs dans leur chambre ou dans un garage. La progression exponentielle d’Internet entraîne la hausse du chiffre d’affaires. Cela leur permet de s’agrandir et de s’installer dans des locaux appelés plus tard Data Center.
Les hébergeurs français se sont créés grâce au besoin de communication des entreprises. Pour les particuliers, le marché était pris par le trublion de l’Internet : Free. Xavier Niel proposait (et propose toujours), l’hébergement gratuit des pages personnelles. Connaissant l’offre Free de l’époque, on peut se demander comment c’était financé.
Mais revenons chez nos hébergeurs. Leur travail est de vendre de l’espace mémoire et de la bande passante pour que les sites web de leurs clients soient visibles sur Internet. Le cadre est simple, des ordinateurs avec une connexion au réseau d’un opérateur. Pour les débits demandés, on ne parle pas du modem 56 K, ni de RNIS mais de câble.
Un client atteint un serveur. Un serveur est contacté par de nombreux clients. Pour leur répondre simultanément, la connexion à Internet doit être rapide. Les hébergeurs payaient cher des accès à Internet performants et permanents pour proposer leurs services. Rien à voir avec nos forfaits 20h à 99 francs.
Le métier d’hébergeur est un métier d’exploitation. Il y a peu de place à la création. Il faut payer les factures d’Internet et d’électricité. Trouver des locaux, donc payer un loyer. Acheter des nouveaux serveurs physiques, les installer dans des armoires, climatisées, … Plus un métier de comptable que d’informaticien.
Mes excuses. Les protocoles et techniques évoluant, il faut se maintenir à jour pour conserver ses clients. Et proposer des interfaces simples pour que n’importe qui ait envie de créer son site Internet avec son nom de domaine.
En bref, de la technologie, du marketing, de la comptabilité … tout en renouvelant son offre en permanence. C’est un miracle que ces 5 acteurs aient réussi à prospérer face à une concurrence mondiale. Si vous voyez Octave Klaba, le président d’OVH, c’est normal qu’il ait l’air un peu fatigué.
L’Internet français a décollé grâce à eux. Leurs fondateurs sont devenus millionnaires contrairement aux millions d’artistes de la toile. Au moment de la ruée vers l’or, les marchands de pelles s’enrichissent sûrement. Mais le travail n’est pas facile pour autant.
De nos jours, nos politiques parlent de Cloud souverain sans regarder ce qui existe déjà. Il serait temps d’arrêter d’envoyer nos informations à l’étranger. L’argent collectif serait mieux investi dans nos fleurons nationaux. Le rôle de l’État n’est pas de construire l‘Industrie de la France mais de la soutenir.